Penser la sécurité privée différemment : l’agent de sécurité « augmenté »

Agent de sécurité augmenté

La pénurie de main d’œuvre que connaît la sécurité privée révèle des dysfonctionnements notoires auxquels les acteurs de la filière doivent faire face. Pour y remédier, la création d’une entente entre acteurs du secteur et donneurs d’ordre pourrait être une solution.

Elle permettrait notamment la mise en place d’un modèle différent de prestations, qui reposerait sur une vision nouvelle de l’agent de sécurité afin de répondre à la demande croissante.

Comment envisager le futur de la profession ? Quel nouveau paradigme doit-être imaginé ? Quelles solutions pour réussir cette transformation ?

 

Révolutionner le secteur de la sécurité privée

Le premier défi auquel le secteur doit faire face est de réussir à fédérer une filière en silo aux activités disparates.

Avec 8 conventions collectives différentes, la sécurité privée regroupe un ensemble de métiers aux contraintes diverses, regroupant aussi bien la surveillance humaine et la télésurveillance que le renseignement, les technologies, la formation ou les activités de conseil. Imaginer une architecture commune, pour apporter une réponse globale, semble être de mise.

Appliqué à l’écosystème de l’entreprise, la fonction sécurité-sûreté doit également reprendre un rôle central.

Confrontée à des risques de plus en plus diffus, les organisations misent sur les directions « Sécurité et Sûreté Corporate » pour mettre en œuvre des solutions adéquates de prévention, protection et pilotage des interventions. Pour cela, elles doivent pouvoir s’appuyer sur un capital humain, organisationnel, technique et technologique afin de répondre aux enjeux stratégiques de leur activité.

Ainsi, restructurer le secteur de la sécurité privée nécessite de créer une concertation entre tous ces acteurs et leurs mandataires afin d’envisager le renouveau du métier et des prestations.

Une réorganisation qui offrirait une meilleure connaissance des contraintes, compétences, prérogatives et coûts liés au déploiement d’agents de sécurité. Un remaniement qui permettrait, in fine, de répondre aux besoins du marché en s’appuyant sur des agents mieux formés, plus performants et plus polyvalents, sans augmenter les effectifs.

 

Vers un agent de sécurité « augmenté »

Comment réinventer le métier d’agent de sécurité afin de satisfaire la demande, sans compter sur un vivier de candidats prolifique ? La réponse en 3 points.

Repenser la formation

La formation aux métiers de la sécurité privée se doit d’évoluer. Souffrant d’un niveau de qualification trop faible, la logique actuelle qui consiste à augmenter les heures n’est pas suffisante. Il convient de requalifier les fondements même pour la rendre plus technique et opérationnelle.

L’obtention d’une carte professionnelle ne peut reposer que sur un apport théorique, la formation doit permettre de préparer à la réalité du terrain et notamment aux situations conflictuelles ou dangereuses. Face à un public de plus en plus bigarré, l’agent de sécurité doit aujourd’hui posséder des notions de médiation et d’accueil et savoir détecter d’éventuels comportements « à risques ». Il doit être en mesure de comprendre sa mission et son contexte pour pouvoir s’adapter à des situations variées et évoluer dans un environnement de travail diversifié. Des qualifications que seul un entraînement in-situ permet d’obtenir.

Redorer la profession

Offrir de l’attractivité aux métiers de la sécurité privée exige de revaloriser leur image et leurs fonctions. La reconnaissance des savoir-faire conduit inévitablement à une meilleure rémunération, plus en phase avec les exigences du métier. De même, les conditions d’exercice et l’équipement fourni peuvent être réévalués pour améliorer le confort de mission et susciter des vocations.

Pour des agents de sécurité plus performants, il est aussi nécessaire de favoriser une certaine polyvalence afin de donner plus de sens aux missions confiées. Ils pourront ainsi mieux répondre aux variations de l’activité, aux aléas et à l’évolution des risques. En élargissant leurs responsabilités et en offrant une intégration optimale dans leur environnement de travail, notamment par une connaissance aboutie des risques à prendre en compte, les recrues seraient alors plus impliquées et dynamiques.

Enfin, pour offrir des perspectives de carrière et faire monter en gamme le secteur, structurer l’encadrement et l’évolution professionnelle semble être une priorité pour faire progresser la sécurité privée.

S’appuyer sur les nouvelles technologies

La transformation numérique actuelle impacte aussi les métiers de la sécurité et entraîne des mutations profondes de son exercice. Doté de nouveaux outils technologiques, l’agent de sécurité est déjà en mesure d’assurer ses fonctions sous un nouveau jour, plus efficace.

Pour la sécurité des sites, l’utilisation de caméras de vidéoprotection dites « intelligentes », qui détectent en temps réel une menace ou un comportement inhabituel, est déjà d’actualité. Pour les surfaces les plus étendues, les drones font leur apparition afin de détecter rapidement un événement suspect. L’arrivée de ces nouvelles technologies font aussi l’objet d’une centralisation et d’un pilotage, sur site ou à distance, avec la mise en place d’un centre de commandement.

Du côté des agents, ils pourraient être pourvus de caméras embarquées et de systèmes de partage d’informations en temps réel, qui permettent d’analyser les situations et recevoir des consignes, afin d’intervenir rapidement et efficacement. Des solutions d’inspection-filtrage innovantes émergent dans le but de remplacer les traditionnelles techniques de palpation et les portiques de détection, faillibles et coûteux en personnel. Autant d’expertises supplémentaires qui offrent de nouvelles perspectives à la profession.

Ainsi, la consolidation du marché de la sécurité privée engage nécessairement une nouvelle vision de ceux qui le constituent au quotidien. L’agent de sécurité augmenté n’est pas qu’un employé doté d’outils technologiques. Ce doit être un véritable collaborateur formé à l’excellence, soutenu par les nouvelles technologies, apte à prendre en compte la diversité des risques et des besoins, qui peut alors donner du sens à sa mission. Un cercle vertueux qui profite à toute la profession.

Unir acteurs et mandataires autour de cette perspective commune, c’est permettre la création d’un modèle de prestation inédit, basé sur la performance de ses agents. Souhaitons que les concertations en cours, au niveau de la filière comme au niveau gouvernemental, permettent d’y aboutir.